Romans

 


Les Cavaliers

Joseph Kessel
Editions Gallimard, 1982

  Kessel a situé en Afghanistan une des aventures les plus belles et les plus féroces qu'il nous ait contées : Les personnages atteignent une dimension épique : Ouroz et sa longue marche au bout de l'enfer... Le grand Toursène fidèle à sa légende de tchopendoz toujours victorieux... Mokkhi, le bon sais, au destin inversé par la haine et la découverte de la femme... Zéré qui dans l'humiliation efface les souillures d'une misère qui date de l'origine des temps... Et puis l'inoubliable Guardi Guedj, le conteur centenaire à qui son peuple a donné le plus beau des noms : « Aïeul de tout le monde »... Enfin, Jehol "le Cheval Fou", dont la présence tutélaire et « humaine » plane sur cette chanson de geste... Ils sont de chair les héros des Cavaliers, avec leurs sentiments abrupts et primitifs. Et pourtant le souffle de la fable et du mythe les anime et nourrit le roman.

 

  Militaire, puis correspondant de guerre, journaliste, Kessel a fait le tour du monde. Au tout début, il est allé en Russie. En 1919, il était avec le corps expéditionnaire français à Vladivostok. Kessel a bâti la plupart de ses nouvelles et romans sur des choses qu’il a vues ou du moins des périodes qu’il a vécues. Les Cavaliers ne vous servira pas à préparer un voyage au Kirghizistan, vu que ça ne se passe pas là-bas et c’était il y a assez longtemps, mais est incontournable, à la fois parce qu’il vous transporte dans une culture dont on retrouve le souffle dans toute l’Asie centrale (celle du cheval et de l’itinérance) et parce que, de toute façon, c’est magnifique, même si vous ne connaissez rien à cette région éloignée.

  Kessel a écrit Les Cavaliers en 1967, s’inspirant d’un séjour passé en Afghanistan en 1956 pour le tournage d’un film Le jeu du roi. Il y découvre les histoires vraies et des personnages réels dont il fera la base de son roman. Il raconte : « C’est au cours du bouzkachi ou "jeu du roi" qu’Ouroz s’est cassé la jambe. Comme le personnage de mon livre, il est allé à l’hôpital de Kaboul d’où il s’est échappé avec son palefrenier, car il ne pouvait supporter ni d’avoir une jambe dans le plâtre, ni d’être soigné par une femme. Le reste appartient à la fiction du roman. »

  Pour la petite histoire (Rémi)... :
  Je me souviens d’un été où je devais avoir 15 ans. A l’époque, les vacances étaient encore suffisamment longues pour avoir le bonheur de se retrouver avec un jour sans rien à faire, et rien de prévu le lendemain non plus. A la bibliothèque, j’avais emprunté Les Cavaliers, parce que la photo me plaisait, que les noms des personnages évoquaient déjà pour moi un ailleurs attirant. Je me suis plongé dans le livre et y suis resté en apnée tous les jours suivants. Rarement un livre m’a autant transporté. J’avais voyagé en restant dans mon salon. Peut-être que cet effet surpuissant était plus dû à mon âge qu’au talent de Kessel, mais je veux croire que non. Je me suis promis de le relire pour vérifier, mais, 10 ans après, je ne parviens malheureusement plus à prendre des vacances suffisamment longues et vides pour me laisser porter une semaine dans un livre...